A 27 ans, Abdel Said est déjà doté d’une belle expérience. Auteur d’une superbe saison 2016, le cavalier égyptien a crevé l’écran en novembre à Vérone en s’adjugeant le Grand Prix Coupe du Monde. Webstallions vous propose de découvrir son parcours, ses chevaux, son fonctionnement et ses aspirations dans une interview passionnante.
Quel a été votre parcours ?
Je suis né à Alexandrie et j’ai commencé à monter à cheval à 5 ans dans un club où je pratiquais également d’autres sports. Au bout d’un an, je me suis intéressé au saut d’obstacles et j’ai décidé d’arrêter les autres sports et de monter à cheval de manière plus sérieuse. Mes parents m’ont acheté à cette époque deux chevaux arabes et j’ai commencé à travailler avec un entraîneur local à ce moment-là.
Quand j’ai eu dix ans, je suis allé aux Pays-Bas avec mes parents et mon entraîneur de l’époque pour chercher un cheval. Nous sommes venus pour acheter un cheval et nous en avons finalement acheté deux chez Emile Hendrix. Mes parents se sont bien entendus avec la famille Hendrix et l’année d’après, pendant mes vacances d’été, mes parents ont demandé à Emile si je pouvais venir m’entraîner là-bas pour apprendre. Il a accepté et depuis nous n’avons jamais quitté l’Europe. Mes parents m’ont inscrit dans une école internationale à Eindhoven. J’allais à l’école toute la journée et tous les soirs je montais deux chevaux avec Emile, puis je faisais mes devoirs en rentrant. J’ai fonctionné comme cela jusqu’à l’obtention de mon diplôme à 18 ans.
Ensuite j’ai voulu passer professionnel mais il y a eu la crise financière et mes parents ne pouvaient plus m’aider. J’ai donc commencé à travailler chez Jos Lansink, ce qui a été une très bonne expérience. Je suis resté là-bas un an. Puis j’ai entendu parler d’un emploi chez Star Horses, qui était un poste qui me correspondait davantage puisque cela me permettait de faire de plus gros concours alors que chez Jos je m’occupais davantage de préparer les chevaux pour les vendre. J’ai pris ce poste, ce qui à cette époque a été une très bonne décision pour ma carrière. J’ai eu un très bon cheval appelé Avenir (Phin Phin x Flamingo). Ce cheval, qui était le seul que je montais à ce niveau à l’époque, m’a mené jusqu’à la 65ème place mondiale, ce qui était formidable. Quelques semaines avant les JEM du Kentucky, le propriétaire et moi avons eu une mésentente et j’ai décidé de commencer me mettre à mon compte. J’ai sacrifié le fait d’aller aux JEM mais je pense que c’était la bonne décision.
Pouvez-vous nous parler de vos chevaux marquants ?
Avant Avenir j’ai eu un des meilleurs chevaux, si ce n’est le meilleur cheval de ma vie, une jument qui s’appelait Sky-High (Garmisch x Casimir). Mes parents avaient acheté la jument à cinq ans à Emile Hendrix, c’était d’ailleurs le cheval que nous avions acheté le plus cher à ce moment-là. J’étais fou d’elle. Normalement il n’était pas prévu d’acheter un jeune cheval pour un jeune garçon mais je l’aimais tellement que j’ai poussé Emile à me la présenter. Cette jument a été incroyable pour moi. Quand j’ai eu 18 ans, nous avons été 4èmes du Grand Prix CSIO de Dublin, fait la finale de la Super League à Barcelone où nous avons réalisé un sans-faute dans le Grand Prix et été sans-faute dans le Grand Prix Coupe du Monde d’Oslo. Malheureusement elle s’est blessée gravement en transport dans le bateau qui l’amenait à Helsinki. Cela a été vraiment bouleversant pour moi humainement, d’autant plus que ça m’a vraiment fait redescendre sportivement parlant. Perdre Sky-High a certainement été ma plus grande déception jusqu’à ce jour.
Heureusement, après elle, j’ai eu Avenir qui était vraiment une star et m’a permis de remonter. Nous avons eu de très bons résultats, comme une 2ème place à Anvers, une 5ème à Londres, une victoire dans une grosse épreuve à Londres et Anvers. C’était vraiment un bon cheval.
J’ai ensuite eu la chance de rencontrer François Leiser (NDLR : propriétaire à l’époque de Carlina, Ulysse…), qui a été vraiment bien avec moi, je ne peux dire que de bonnes choses à son sujet. Même si ses chevaux de tête étaient montés par Pius Schwizer, j’ai saisi l’opportunité de monter pour lui et j’ai essayé de faire de mon mieux avec une attitude positive, je pense que François appréciait cela. J’ai monté pour lui Duc de Mariposa (Nabab de Reve x Primo des Bruyeres) à partir de ses 7 ans et à la fin j’ai fait quelques étapes du Global Champions Tour avec lui même si ce n’était peut-être pas complètement un cheval pour ce niveau. Il a aussi été sans-faute dans le Grand Prix d’Oslo à huit ans, sans-faute dans le Grand Prix de Leipzig… donc nous avons eu de bons résultats. Nous sommes passés tout près de la qualification pour les JO, j’ai fait quatre points sur le dernier au barrage !
Après cela j’ai monté Der Senaat 111 (President x Burggraaf), un bon étalon d’Harrie Theeuwes chez qui mes chevaux étaient installés et pour qui je montais un peu. Il a fait un très bon concours à Londres où il a terminé 5ème du Grand Prix et il a aussi fait d’autres bonnes performances.
Par la suite j’ai eu Vingino (Voltaire x Cassini I) (NDLR : acheté lors de la vente aux enchères Eurocommerce) qui m’a remis sur le devant de la scène. Il a été 5ème à Mannheim et il a fait de bonnes choses en CSIO. Il m’a emmené aux JEM qui n’a pour être honnête pas été ma meilleure expérience mais cela m’a vraiment appris ce à quoi je devais m’attendre la prochaine fois. C’est en cela que je regrette de ne pas être allé à Lexington en 2010. Je me suis toujours dit que pour aller à un concours il fallait avoir une chance de gagner, mais ce n’est pas toujours complètement vrai. Si j’étais allé à Lexington, je me serais préparé de manière complètement différente pour les JEM de Caen, qui a par ailleurs été pour moi un formidable événement, l’un de mes préférés de toute ma carrière, avec une atmosphère incroyable dans le stade. J’ai tiré du positif de cette expérience négative, maintenant je sais à quoi m’attendre la prochaine fois que je participerai à un championnat. Ce n’est pas comme n’importe quel autre concours, la pression est complètement différente, les obstacles sont gros dès le premier jour, il y a de la pression à monter pour son pays, le public, c’est vraiment autre chose.
J’ai également monté Dakota (Cento Lano x Ireco) qui a été une jument très utile pour moi. Nous l’avions achetée en même temps que Vingino. Je l’ai montée pendant quelques mois et elle a ensuite été vendue aux Etats-Unis. Ensemble, nous avons terminé 2èmes du Grand Prix de Paderborn. Elle a été 7ème du GP au CSIO d’Abu Dhabi. Ce n’était pas vraiment une jument pour sauter un championnat mais une vraie jument de concours.
La suite, c'est demain !
Photo 1 : Abdel Said - Collection privée
Photo 2 : Avenir a permis à Abdel Said de remporter de nombreuses épreuves internationales. Le couple s'est séparé juste avant les JEM de Lexington - Crédit Photo Claire Simler
Photo 3 : Vingino a permis à Abdel de participer aux Jeux Equestres Mondiaux de Caen - Crédit photo Claire Simler
Photo 4 : Dakota, vendue aux Etats-Unis, a permis à Abdel de se classer 7ème du GP CSIO d'Abu Dhabi - Crédit photo Claire Simler